Mercato

Mercato – Toulouse et Amine Adli, ou la difficulté pour les clubs de Ligue 2 de gérer les dossiers des jeunes talents

Damien Comolli a choisi de taper du poing sur la table dans la presse. Dans un entretien cash et très clair accordé à La Dépêche du Midi, le président de Toulouse a indiqué qu’Amine Adli ne jouerait plus, au moins jusqu’au 1er septembre et la fin du mercato estival en Ligue 2. Une décision forte de se priver du meilleur joueur de la saison dernière, titulaire lors de la première journée et exclu en fin de match contre Ajaccio (2-2), et qui pouvait faire son retour dans le groupe contre Bastia ce samedi.

A lire aussi >> Patrice Garande revient sur son départ de Toulouse et privilégie « la L1 ou la Ligue 2 » pour la suite

Comment les Violets en sont arrivés à une telle situation, aucunement souhaitable pour les deux parties ? Amine Adli est passé professionnel dès 2018 avec son club formateur. Entré en jeu à quatre reprises lors de la funeste saison 2019-2020 en L1, le milieu offensif/attaquant saisit sa chance avec la relégation pour prendre ses marques en équipe première en Ligue 2 et ne plus jamais quitter l’équipe sous les ordres de Patrice Garande. Dès lors, Damien Comolli tente de prolonger son joueur à de multiples reprises, conscient que sa valeur va grimper en flèche et que son contrat se termine en juin 2022. Les négociations entre les différentes parties n’aboutissent pas, mais Adli s’implique à 200% pour faire remonter le TFC, balayant les intérêts de l’OM au mercato hivernal par exemple sans se plaindre ni perdre son influence dans le jeu toulousain.

Mais sans montée en Ligue 1, la situation inexorable se produit : Damien Comolli veut absolument vendre la pépite Adli à un an de la fin de son contrat, sous peine de le voir partir libre en juin 2022, ce qui serait un coup dur dans le projet de RedBirds, l’investisseur américain. C’est là toute la difficulté pour les clubs de Ligue 2 avec les jeunes joueurs : comment rentabiliser au mieux la formation des talents amenés à partir, tout en essayant de faire converger les intérêts de tous ? Dans ce cas précis, Comolli précise dans La Dépêche : « Nous avons reçu deux offres. Une d’un club du Top 5 européen pour 10 millions d’euros, et une du Top 15 européen pour 12 millions d’euros. Le joueur a refusé les deux clubs, que je ne peux pas nommer mais ce sont des clubs gigantesques ». Oui mais voilà, si le président regarde l’aspect purement financier des offres, le joueur, lui, a évidemment le droit d’avoir envie de porter les couleurs de tel ou tel club, sans être forcé de partir pour une formation qui peut aligner le chèque tant espéré par sa direction…

Le Havre, Nancy… d’autres clubs souvent pillés chez les jeunes

Ce cas, il peut être transposé à bon nombre de clubs formateurs en Ligue 2. A l’exemple du Havre AC. Ces dernières années, le club normand a perdu de véritables talents presque gratuitement (si l’on excepte les indemnités de formation) : Harold Moukoudi (ASSE), Pape Gueye (OM), Loïc Badé (Lens)… Certains en fin de contrat sans avoir réussi à les prolonger (ce qui pourrait arriver avec Adli), d’autres comme Badé parce qu’ils n’ont pas signé pro. A Nancy, le cas Christopher Wooh (Lens) vient également de se produire cet été avec un départ sans signer pro. Pour remédier à cela, le HAC a donc changé son fusil d’épaule et a fait passer professionnel un grand nombre de jeunes du centre. Avec le défaut de se retrouver dans un effectif trop nombreux, avec des joueurs sous contrat qui n’ont pas forcément le niveau de s’imposer en Ligue 2. Plus question en revanche de mettre en avant chez les pros un joueur comme Badé avant la signature d’un contrat pour éviter pareille mésaventure. « Quand on détecte, qu’on recrute et qu’on forme des joueurs, cela représente un investissement très lourd, de l’ordre de 30 000 euros par joueur. Une fois que le joueur sera prêt à être valorisé, il faut qu’il s’engage vis-à-vis du club. Donc si le joueur ne signe pas pro, il ne pourra pas jouer avec l’équipe première, c’est aussi simple que cela« , avait indiqué le président Vincent Volpe en juillet 2020.

Cette difficulté de rentabiliser les jeunes a conduit Rani Assaf à tout simplement enlever l’agrément de son centre de formation cet été à Nîmes après avoir envisagé sa fermeture pure et simple. De ce fait, les joueurs ne peuvent plus signer de contrats et peuvent partir pour un autre club à tout moment. C’est le seul cas de figure en Ligue 2. Du côté de Nancy, pointé du doigt récemment par la majorité des autres pensionnaires du championnat pour ses pratiques pendant le mercato, l’ancien président Jacques Rousselot s’est longtemps arraché les cheveux de voir des Michaël Cuisance (Mönchengladbach à l’époque) ou plus récemment Gauthier Ott (Hoffenheim) partir sans même signer professionnel. Un écueil rencontré aussi par Gauthier Ganaye avec Wooh. Autant de belles ventes potentielles qui passent sous le nez des clubs de L2, qui en ont pourtant besoin pour boucher les déficits structurels inhérents à la division, et renforcés par la crise des droits TV et la pandémie. Une grande réflexion à ce sujet va être menée au sein des instances. Avec notamment, l’idée de pouvoir passer de trois à cinq ans la durée du premier contrat professionnel d’un jeune. De quoi faire évoluer ces situations ? A voir…

Crédit photo : Thierry Breton/Panoramic/Imago.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *