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Troyes – Kouamé, briseur de lignes

Crédit photo : © Anthony Bibard, Panoramic / Imago

Il n’a pas marqué. Mais il aura éclaboussé de toute sa classe la rencontre au sommet de la 35e journée de Ligue 2, entre Troyes et Grenoble (3-1), ce samedi 24 avril. Rominigue Kouamé N’Guessan, de son nom complet, a juste régalé face au GF38. Des prises de balle propres, des rushs vers l’avant, des passes fouettées bien senties, avec son pied gauche. Bref, le milieu de terrain malien de 24 ans, prêté par Lille, a lavé ses adversaires, comme dans beaucoup de matchs depuis le début de saison. Alors avant que l’ESTAC ne monte -probablement- en Ligue 1, que le joueur reparte dans le Nord, ou pas, selon le mercato du LOSC et l’option d’achat de Troyes, petit tour du propriétaire de ce qu’est capable de faire Kouamé, dans le système si particulier de Laurent Batlles dans l’Aube.

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Pied gauche inversé, ses passes, le moteur du milieu de Laurent Batlles

« Rominigue est un garçon assez timide, très à l’écoute, discipliné et doté d’un bon pied gauche. Son poste de base est milieu, mais on doit encore découvrir dans quel registre il peut le mieux se révéler, se rendre le plus efficace possible. Techniquement, il est très habile et sait aussi se montrer agressif sur le porteur du ballon. Il dispose d’une bonne mentalité et d’une certaine marge de progression. » Ces mots sont ceux de Rachid Chihab, coach de la réserve lilloise, à l’arrivée du jeune Kouamé au LOSC, en 2016. Depuis, il est clair et net que le registre du milieu, prêté successivement au Paris FC, au Cercles Bruges, puis à Troyes, est de briser les équipes adverses… Et surtout leurs lignes. Par la passe ou la course, Kouamé s’est rendu indispensable dans l’exigeant mais brillant 3-3-1-3 de Laurent Batlles. Le numéro 6 troyen occupe la place de milieu droit, chargé d’alimenter Chambost, le meneur, ou les attaquants Touzghar et Saint-Louis.

Si les percées dévastatrices de Kouamé laissent une forte impression sur les rétines, le joueur a étoffé son jeu, à côté de cela. C’est par la passe aussi et désormais qu’il fait avancer l’ESTAC, décalant souvent des coéquipiers, trouvant des angles en partant de la droite, pour ouvrir sur la gauche et son pied fort. Contre Grenoble (3-1, 35e journée ce samedi), ce fut une véritable masterclass du Malien.

C’est lui qui lance Dylan Saint-Louis en profondeur côté droit (image ci-dessus),  sur l’égalisation de Touzghar, après un échange de balle rapide avec son compère Chambost. Puis encore lui qui, après une percée et une remontée de balle suite à un corner du GF, trouve Chambost en deux touches de balle (image ci-dessous). Ce dernier touchera Touzghar dans l’espace vide laissé par les défenseurs de Grenoble, espace dans lequel les attaquants de l’ESTAC se seront engouffrés tout l’après-midi. En seconde mi-temps, Kouamé utilise encore son pied gauche pour lancer le Tunisien, pas passé loin d’un triplé (seconde capture d’écran, toutes les captures images de beIn Sports).

Une capacité à briser les lignes par sa puissance, sa vitesse

Si Rominigue Kouamé a ajouté une maturité dans le jeu, à son talent déjà certain, il garde à 24 ans une puissance et explosivité qui font des ravages entre les lignes adverses, donc. D’autant plus lorsqu’il y a de l’espace. Ainsi lors du choc de la 35e journée, on a vu plusieurs fois le milieu box-to-box traverser le terrain, apportant le danger jusque dans la surface adverse.

Surtout, ce qu’il y a d’intéressant avec le joueur, c’est qu’il sait s’arrêter avant de s’emplafonner ou s’enfermer dans les défenses. Contre le Paris FC le 7 décembre, Kouamé perce balle au pied (images de la Ligue 2), s’arrête, puis  décale à entrée de la surface Chambost, qui marquera d’une superbe frappe. Si naturellement le tir incroyable du meneur magnifie l’action de son coéquipier, cette faculté à ne pas aller trop loin après avoir pourtant fait plusieurs dizaines de mètres balle au pied se répète souvent.

 

Kouamé s’est arrêté, il temporise, puis décale Chambost. Un arrêt similaire à celui sur le second but de Touzghar contre Grenoble, révélateur d’une maturité dans le jeu, combiné à une puissance physique et une capacité de courses énorme(s).

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Projection sans ballon, appels dans la profondeur, disponibilité

Mais il n’y a pas qu’avec le ballon dans les pieds que le joueur prêté par le LOSC (sous contrat dans le Nord jusqu’en 2022) performe. Le système particulier de Batlles impose à ses joueurs de la disponibilité. Mais quand ceux-ci sont en forme, l’impression d’irrésistibilité n’est pas loin… Face à Grenoble, hormis 10-20 bonnes minutes des visiteurs, l’ESTAC a dominé son sujet, porté par les courses en profondeur et sur la largeur de Saint-Louis ou Touzghar… Et de Kouamé ! Le milieu n’hésite en effet pas à se projeter, pendant qu’Azamoum ou un autre verrouille.

Sur la première capture, le Malien demande la balle en profondeur samedi. Charles Pickel (rond blanc avec Kouamé) est dépassé et ne peut suivre. Kouamé avancera jusqu’à la surface, où son crochet pied droit-centre du gauche créeront une occasion de but. Seconde capture, contre le Paris FC à nouveau, avec Kouamé qui fait un appel et se rue dans l’espace libre sur une récupération haute. Troyes marquera sur l’action.

Dernier point hautement captivant du jeu de Kouamé, c’est donc sa disponibilité, déjà vue plus haut au fil de ses caractéristiques. Ses déplacements sans ballon le rendent très souvent touchable par ses coéquipiers placés autour, et comme son physique va bien, c’est probablement la raison pour laquelle le joueur crève l’écran, et qu’on ne voit souvent que lui au milieu de terrain. Face à Clermont il y a quelques semaines, le milieu avait inscrit un beau but d’une frappe en lulu, sur une course bien sentie jusqu’à l’entrée dans la surface, alors qu’il n’était pas sûr d’avoir le ballon, dévié sur le centre.

Pour résumer, Kouamé (deux buts, trois passes seulement en 29 matchs en soi) apparaît comme un milieu ultra-complet en Ligue 2. Gaucher positionné à droite du milieu dans le 3-3-1-3 de l’ESTAC, il a une faculté à écarter le jeu et trouver de bonnes passes avec sa qualité de pied, est en mesure de rusher, avec une propension à traverser le terrain balle au pied, puis de temporiser, mais aussi de se rendre disponible et de faire des appels en profondeur. Sa palette technique demande à être étoffée sur le jeu long, mais le Malien de 24 ans pourrait repartir à Lille en Ligue 1 dès cet été, si ce secteur de jeu se retrouve dépeuplé au mercato dans le Nord. Ou le natif de Lopou, en Côte d’Ivoire, pourrait rester à Troyes, probablement dans le même championnat, puisque l’ESTAC dispose d’une option d’achat. Quoiqu’il en soit, on devrait rapidement voir Rominigue Kouamé N’Guessan au plus haut niveau…

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