Manager général de Grenoble, Max Marty a pris le temps pour MaLigue2 de faire le point sur tous les sujets concernant l’actualité du club isérois en Ligue 2 : la suspension du championnat et le flou sur son avenir, l’impact financier de la crise sanitaire sur le GF38, la gestion du mercato pour préparer la saison prochaine, sans oublier le bilan sportif dressé après 28 journées disputées.
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MaLigue2 : Max, comment allez-vous et comment vivez-vous ce confinement ?
Max Marty : C’est quelque chose d’assez exceptionnel. Je le vis presque comme un moment d’Histoire. C’est quelque chose qui n’est jamais arrivé. J’essaie de le voir avec un peu de recul, avec un peu de maîtrise. Je crois qu’aujourd’hui le foot est un peu futile. On cherche plutôt à comprendre le Monde, et ce qui est en train de se passer. C’est un moment de réflexion, d’introspection. C’est rare les moments comme cela dans notre boulot, où on a le temps de réfléchir. Cela nous sort la tête du guidon. Donc à quoi sert le foot dans tout cela ? C’est intéressant de se reconcentrer sur l’essentiel.
Le foot est secondaire en ce moment, mais gardez-vous un contact régulier avec le staff et l’effectif ?
Plus que cela même, car ça reste notre famille ! Le président, le staff, les joueurs… cela reste important. Et quand j’emploie le terme de famille c’est tout à fait cela : est-ce qu’ils vont bien ? Comment ils sont confinés ? Quelle est leur vision des choses ? Comment ils se préparent ? Comment on peut limiter la casse, et sortir tous ensemble de cette situation ? Bien sûr, c’est très intéressant car le contact est différent.
Le staff n’est pas dans le choix permanent de se dire « qui va jouer, qui ne va pas jouer ». Moi, je ne suis pas en permanence dans l’objectif. On dépasse ce cadre-là. On voit les joueurs en fin de contrat, on pense à la suite, on réfléchit au recrutement et à la construction du club, aux évolutions budgétaires, quels efforts on devra faire en priorité, comment aider nos partenaires qui seront eux aussi en difficulté… c’est très intéressant humainement.
Après une période de congés payés, Grenoble a-t-il recours au chômage partiel pour tenter de limiter les pertes ?
Oui, tout à fait. On l’a dit aux joueurs avec le président. Nous sommes un petit bateau, avec une petite voilure. Nous sommes peut-être moins impactés que les autres, notre président gère cela avec une grande attention, nous faisons partie des clubs qui ne perdent pas d’argent. On a une lisibilité un peu plus solide. Bien sûr que nous sommes touchés et que cette année c’est plus compliqué tant que nous ne saurons pas si on reprend ou pas, avec certains droits télé payés, ou pas. Il y a beaucoup d’incertitude. Mais notre difficulté financière reste moins importante que certains clubs qui sont sur la corde raide, et qui sont déjà borderline tout au long de l’année. On a un peu de marge, pas beaucoup, mais un peu.
Aujourd’hui avec un confinement qui va sans doute être amené à se prolonger encore un peu, imaginez-vous encore possible la reprise de la saison, ou pensez-vous comme certains dirigeants qu’il faille stopper celle-là pour se consacrer déjà à bien préparer la suivante ?
Nous là-dessus, on est à 100% de l’avis de notre syndicat, l’UCPF, et de ce qui a été mis en place par Bertrand Desplat et Claude Michy. Aujourd’hui, l’idée est de sécuriser le contrat avec Mediapro et Canal + pour les années à venir. On parle de 5,3 milliards d’euros, et les 250 millions qui restent à payer ne pèsent pas beaucoup. Alors nous, nous sommes capable de traverser cette grosse tempête, donc c’est plus facile à dire. Mais bien évidemment pour nous, l’avenir est plus important que le présent. J’ai bien compris que beaucoup voulaient reprendre, et nous aussi, les choses sont claires.
Mais même si cela dure encore 15 jours, trois semaines…. tant que les règles du déconfinement ne sont pas explicitement programmées – par région, par tranche d’âge, est-ce que l’école va reprendre – j’ai du mal à me projeter dans la reprise. On travaille tous les jours comme si on allait reprendre demain car on est des « jusqu’au boutistes », on est des compétiteurs et on aime ça. Mais quand la raison reprend le dessus, ça ne me paraît pas si simple. Je n’aimerais pas être en position de prendre des décisions nationales car je ne vois pas de bonne solution sur la façon d’organiser le déconfinement. Et tant que cela ne sera pas tranché, je ne vois pas comment on peut se projeter dans la reprise.
Certains joueurs arrivent en fin de contrat, est-il possible pour le club de continuer quelques négociations concernant l’avenir ? Et qu’en est-il du mercato aussi concernant la saison prochaine, est-il stoppé ?
Nous sommes souvent en avance sur ces sujets. Nous sommes effectivement en train de prolonger un joueur ou deux. On a déjà ciblé les profils de joueurs qu’on voulait recruter. J’ai encore échangé hier avec le staff sur des noms pour le recrutement sur 3-4 postes où on va être amené à évoluer. La seule chose qui nous manque aujourd’hui est d’aller voir des matchs car nous sommes moins habitués à le faire sur vidéo, même si les outils comme Instat ou Wyscout sont importants. On aime bien aller voir sur place. On avait déjà anticipé le recrutement d’un joueur, Bart Straalman, qui évolue aujourd’hui à Rodez et qui va nous rejoindre. On a encore 2-3 joueurs à prendre et notre réflexion avance avec le staff et les recrues. Rien ne s’est arrêté à ce sujet car nous ne sommes pas dans la logique de faire des recrutements à des dizaines de millions d’euros.
On n’est pas impacté sur ces sujets, même si il faudra savoir à quel niveau on situera la masse salariale. Nous avions la 19e masse salariale de Ligue 2 l’année passée, on a plutôt envie de progresser et de se rapprocher à des budgets plus importants. On réfléchit. On sait que ce ne sera peut-être pas l’année prochaine car nos partenaires vont souffrir, on ne sait pas exactement combien on percevra des droits télé car les négociations sont pour le moment à l’arrêt. Mais nous sommes des gens prudents, nous ne dépensons pas à crédit. On a un président qui gère cela comme son entreprise, ce n’est pas toujours le cas. On a cette chance. De temps en temps ça nous contraint un peu, on boude un peu. Mais on s’aperçoit à la sortie qu’aujourd’hui dans une période comme celle-là, c’est lui qui a raison.
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Sur le plan sportif, quel regard portez-vous sur la saison du GF38 jusqu’à présent après le gros virage amorcé l’été dernier avec un gros renouvellement de l’effectif ?
On était un peu déçu de nos 3-4 derniers matchs. Nous sommes 9es après 28 journées alors qu’on aurait pu accrocher une place entre 5 et 9, plutôt vers la 6e, 7e place. Cela nous semblait plus conforme à ce qu’on pouvait faire. On savait qu’on aurait une première partie de saison difficile avec tous ces changements, et la deuxième partie normalement aurait dû nous permettre de prendre plus de points avec plus de fluidité. On était un peu dans le dur, on espérait que le match contre Orléans nous permette de prendre des points et de nous relancer.
Mais on est plutôt satisfait de ce qu’on a fait, ce n’était pas simple de prendre ce virage. On est maintenant sur des petites retouches, des petits détails, qui doivent nous amener à être plus compétitifs l’année prochaine. Cela reste quand même notre objectif numéro 1. On parle d’argent, de masse salariale, etc, mais à la fin ça se joue à 11 contre 11 sur le terrain. Et ce sont ceux qui ont le plus d’envie, qui sont le mieux armés, qui sont le plus complémentaires, qui y arrivent. On reste des compétiteurs et on cherche le détail pour s’améliorer l’an prochain.
Avant cette crise, vous avez renouvelé votre confiance au staff technique avec la prolongation de Philippe Hinschberger et ses adjoints, une bonne nouvelle forcément pour la continuité ?
Oui bien sûr. Pour moi c’est le plus important. On a trois membres du staff qui sont là depuis longtemps, des Grenoblois. Et on a prolongé de deux ans Philippe Hinschberger et son adjoint Francis de Percin. Cela nous amène sur une lisibilité de quatre ans. On est dans la sécurité, dans la sérénité. C’est un staff qui travaille bien avec le président, avec moi-même, avec les dirigeants. On sait où on veut aller et on sait qu’on veut faire progresser le club, en créant un centre d’entraînement performant et innovant. On a plein de projets. Je ne dirais pas qu’on va être freiné par cette période, mais il faudra se construire différemment. On regardera aussi ce que font les autres. Mais nous on ne lâchera pas notre cap.
La prolongation du staff est une très bonne nouvelle. Je pense qu’il faut représenter son territoire, Grenoble est une ville innovante, intelligente, j’allais dire de réflexion. C’est vrai qu’il faut un staff qui colle à cette image. On voit que Philippe Hinschberger a plusieurs cordes à son arc. C’est un garçon sémillant, il a une grosse expérience du foot en tant que joueur et entraîneur avec une montée en L1 à son actif. Il représente bien le territoire et c’est important en termes de communication car l’entraîneur reste la clé de voûte de l’édifice.
Propos recueillis par Dorian Waymel