Le FC Sochaux – Montbéliard a reçu une très mauvaise nouvelle ce mardi. Malgré le projet de reprise porté par Romain Peugeot, arrière petit-fils du fondateur du club, le CNOSF a décidé d’émettre un avis défavorable au maintien du FCSM en Ligue 2. Sauf énorme surprise, la formation du Doubs ne devrait donc pas reprendre dans cette division, et peut aussi risquer le dépôt de bilan si Nenking reste aux commandes. Au lendemain de cette désillusion, le directeur sportif Julien Cordonnier a accepté de livrer son ressenti à MaLigue2.
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ML2 : Julien, merci de prendre le temps de vous exprimer malgré cette situation difficile… Le coup de massue est d’autant plus terrible que l’espoir avait repris de la force ces derniers jours ?
Julien Cordonnier : Depuis hier, c’est clair que c’est un effondrement… Romain Peugeot – vu la situation avec le contexte d’un propriétaire (Nenking) qui se désengage du club – avait réussi en très peu de temps à mener un projet viable. Forcément, il y a eu des éléments nouveaux présentés car il a dû faire face à une situation ubuesque, avec Nenking qui se désengage complètement malgré le fait d’avoir émis la certitude que le groupe allait payer. Je trouve que c’est une décision injuste pour le football sochalien, pour la Région. Romain Peugeot avait un projet qui permettait au club de repartir sur des bases saines.
ML2 : C’était un pari un peu fou de réussir à réunir autant d’argent et de soutiens en si peu de temps, et il a presque été réussi…
JC : Oui, la chute est terrible parce qu’on avait repris beaucoup d’espoirs, même si on savait au fond de nous qu’il y avait toujours un risque que cela ne passe pas. Romain Peugeot, ce n’est pas n’importe qui. Ce n’est pas un repreneur qui vient du fin fond de je ne sais où. Malgré cela, le CNOSF a décidé d’envoyer Sochaux au fond du trou, il faut le dire clairement. C’est une grosse colère pour l’ensemble des salariés, des joueurs, des supporters et de la Région. Sincèrement, quand on voit l’amour que les gens ont pour le FCSM, je me pose beaucoup de questions pour la suite, c’est une vraie désillusion.
ML2 : Vous êtes au club depuis seulement quelques mois, mais on sent déjà un attachement particulier de votre part pour le FCSM ?
JC : Quand je suis arrivé, j’ai découvert ce club. Je connaissais un peu parce que j’avais déjà joué ici avec Orléans par le passé. On sent tout de suite que les gens sont passionnés ! Ce n’est pas une région riche, les gens sont très attachés à leur club, il représente beaucoup pour eux. Beaucoup de personnes parlent de l’histoire du club. Cela crée de l’attachement. Cette décision est un déchirement pour tout le monde.
ML2 : A l’heure actuelle, en savez-vous plus sur les procédures à venir ?
JC : On a encore beaucoup de brouillard dans la tête… Je ne vous cache pas que le réveil ce matin était difficile. On sait que Romain a l’intention d’aller devant le Tribunal Administratif. Il y a toujours de l’espoir et il a raison d’aller au bout. Il est convaincu par son projet et il est dans ses droits, on le soutient dans sa démarche. Il reste une petite chance et on fait bien de la saisir.
« On avait déjà plusieurs accords avec des joueurs de nous rejoindre car Sochaux est un club qui parle »
ML2 : A titre personnel en tant que directeur sportif, vous avez vécu un été particulier avec autant de départs à gérer et de joueurs à potentiellement recruter…
JC : Je n’avais jamais connu cela et je ne souhaite à personne de vivre ce qu’on a vécu. On sentait malgré tout qu’on allait avoir la possibilité de se positionner sur des joueurs intéressants. On avait déjà plusieurs accords avec des joueurs de nous rejoindre car Sochaux est un club qui parle et qui donne envie. On aurait eu une équipe compétitive. Malheureusement, les instances du football en ont décidé autrement. Le groupe Nenking a failli à ses engagements et a mis le club en péril. Malgré tout, la Région et le club avaient la chance d’avoir regroupé autour de Romain Peugeot des investisseurs et des collectivités locales pour faire en sorte que le club ne tombe pas. Malgré tout cela, les juristes ou les avocats du CNOSF n’ont pas eu la sensibilité football et se contentent de prendre une décision qui risque de mettre beaucoup de monde sur le carreau, et une région dans la douleur. C’est gravissime.
ML2 : Quand on revient en arrière, rien ne laissait présager cette catastrophe financière quand le nouveau projet sportif à mettre en place vous a été présenté il y a quelques mois ?
JC : Quand j’arrive au 1er février, je sens que c’est un club qui vit sur des moyens aisés par rapport aux joueurs, à la politique salariale adoptée, par rapport à plein de choses. Je me dis que l’actionnaire est très fort. On me confirme qu’il est très fort car il a un projet d’investissement sur un centre de performance à 20 millions d’euros, ce qui montre un certain pouvoir économique. Je me pose donc des questions par rapport à la DNCG. Quand vous voyez le train de vie du club, il aurait fallu mettre des clignotants à la mi-saison ! Quelle est la pertinence du passage de décembre pour laisser six mois après un club au fond du trou ?
ML2 : Vous êtes aussi passé par Châteauroux qui a échappé au pire cet été, n’êtes-vous pas parfois dégoûté par ce gâchis de propriétaires déconnectés de la vie des clubs ?
JC : C’est vrai que ça pose question. Des gens investissent dans des clubs, étrangers ou pas, et ont la lucidité de mettre en place des personnes qui connaissent le football et sa complexité et le contexte des championnats. Je me dis qu’il doit y avoir une réflexion. Certains investisseurs étrangers sont fiables, comme à Auxerre. Mais d’autres non. Peut-être qu’il faudrait garantir au moment d’un rachat le budget de fonctionnement moyen d’un an sur un compte bloqué. On s’aperçoit qu’un propriétaire peut partir du jour au lendemain et laisser ses salariés au bord de la route. Il y a une réflexion à mener là-dessus. C’est trop dangereux et c’est gravissime.
ML2 : Etiez-vous avec les joueurs hier au moment de l’annonce de cette mauvaise nouvelle ?
JC : Tout le monde est marqué. Je suis avec les joueurs ce matin, c’est difficile pour eux. C’est la dure réalité. On avait créé quelque chose de fort. On allait avoir la meilleure équipe en termes d’état d’esprit parce ce que ce qu’on a vécu nous a soudé. On aurait eu une vraie force collective, avec un staff dans sa mission. Une page du livre risque de se fermer mais malgré tout, je suis persuadé que ce club reviendra parce qu’il y a une vraie force avec les supporters.
Propos recueillis par Dorian Waymel
Avis à ceux qui se frottent les mains du sort réservé au FCSM : Sochaux n'est que l'arbre qui cache la forêt du dérèglement financier général (dettes publiques) et de celui du foot en particulier. Ne nous cachons pas derrière le (très) petit doigt de la DNCG : d'autres suivront et plus vite que prévu. Comment Bordeaux peut-il surnager avec un déficit de 40 millions d'euros ? et Lyon, maintenu en L1 avec un trou de 64 millions d'euros ? Par comparaison, les 12 millions de déficit de Sochaux semblent ridicules .... Fallait-il faire un exemple avec un club de province, où les appuis politiques restent limités (souvenons-nous de la bataille menée contre Lens, qui avait vu la victoire judiciaire de Sochaux ... qui attend toujours le règlement des indemnités allouées .... et que les mêmes condamnent aujourd'hui pour cause de déficit) On en rirait si ce n'était pas triste à pleurer.