Jean-Marc Furlan est un entraîneur qui n’y va pas par quatre chemins sur le terrain, il ne calcule pas, il joue. En interview, c’est la même chose : on passe de la philosophie de jeu allemande au discours du Général de Gaulle… Et c’est passionnant !
MaLigue2 : Après la défaite à Bastia, votre équipe a su réagir face à Dijon puis Auxerre…
Jean-Marc Furlan : Les défaites peuvent être des accidents, qui arrivent dans le football. Ce qu’il y a de magique dans le football, comparé à d’autres sports collectifs, c’est que le dernier qui n’a pas gagné chez lui, peut battre une équipe de milieu de tableau. Et, paradoxalement, on peut être très très déçu et colère, tout en étant content pour l’adversaire, qui était heureux comme tout. Quand on a une bonne dynamique, on rebondit. Comme disait le Général de Gaulle « Les succès contiennent les gènes des défaites, et inversement ». Il avait raison : dans les défaites, il peut y avoir une renaissance très intéressante. Il existe des défaites salutaires.
Vous croyez donc encore à la montée ? Après cette défaite à Bastia vous disiez « On est loin à tous les niveaux du club », quelque part c’était un moyen d’enlever la pression sur vos joueurs ?
Je dis ça aussi pour enlever la pression à mes joueurs parce qu’il n’y a rien de plus désagréable que d’avoir peur de ne pas atteindre l’objectif. L’important, c’est d’être dans l’excitation de créer un exploit. Quelque part, je dis aux joueurs « Je crois qu’on a trop de failles, qu’on a trop perdu cette année pour monter ; maintenant, mathématiquement, ce n’est pas interdit d’imaginer qu’on fait partie des 5-6 équipes qui peuvent prendre la 3ème place. » Aujourd’hui, on est à 4 points.
Justement, il y a deux manières de lire le classement : soit se dire « on est à 4 points du 3ème avec la meilleure différence de buts » et c’est abordable, soit « il faut obtenir 61 points comme on l’a calculé » et il vous en manque 18, c’est à dire 6 victoires en 8 matchs…
Je préfère la première solution, en disant qu’il y a une possibilité parce qu’on est qu’à quatre points du podium. La seconde paraît extrêmement compliquée. Maintenant, dans le football, les statistiques sont faites pour être démenties. Mais ce n’est pas le discours que je tiens aux joueurs. Eux, voient les choses comme ça, et c’est normal, ils sont acteurs. Je vois les défauts de notre saison, il faut corriger tout ça et se concentrer sur la tâche à accomplir en améliorant nos défauts et renforçant nos qualités.
Une de vos qualités, c’est le jeu : on ne s’ennuie jamais devant vos matchs…
(il coupe) C’est normal. On reproche beaucoup à Furlan, depuis 10 ans, qu’il ne gagne rien, qu’il descend toujours de Ligue 1 en Ligue 2. Par contre, ce qu’on dit aussi depuis que j’entraîne à Libourne, Strasbourg ou Troyes, c’est que je sais faire jouer mes équipes. Parce que j’aime ça, c’est ma philosophie, ma façon de voir les choses.
Et vous n’êtes pas du genre à renier vos principes de jeu pour 3-4 points supplémentaires qui vous permettraient peut-être d’être troisième…
Non. Parce que je pense que c’est la façon de voir le football moderne et contemporain, c’est un spectacle. Il faut assurer un certain spectacle. Attention, je suis comme les autres entraîneurs, je suis un fou de victoires !
On avait évoqué la question avec Régis Brouard (qui admire le jeu troyen), la Ligue 2 ne convient peut-être pas à votre style ?
Je ne sais pas… Je crois que c’est le « style France », plutôt. Je pense qu’on est un pays où les entraîneurs s’adaptent, on n’est pas des créateurs de jeu. L’Espagne, l’Allemagne, ce sont des gens qui sont novateurs. Il y a deux philosophies : ou on est dans l’esprit de travailler pour la possession du ballon, ou on travaille sans la possession. Des fois on n’a pas la possession parce que l’adversaire est plus fort, mais ma philosophie est de s’efforcer toujours d’avoir le ballon dans les pieds.
Par contre, vous avez des équipes comme Metz où Albert Cartier ne mise pas sur la possession de balle et avec lesquelles on ne s’enmerde pas non plus.
Le football est pluriel, je ne renie aucun football. Le souci est de savoir ce qui est efficace durablement, la culture qu’il faut imprégner dans un club. Des mecs peuvent être extrêmement efficaces sur un an ou deux, en n’ayant pas la possession, mettant beaucoup d’intensité, mais quid sur 3-4-5 ans ? Quid du spectacle aussi ?
Vous posséder un buteur efficace, des milieux de terrain techniques et qui marquent, n’est-ce-pas en phase défensive que votre équipe pêche ?
Cette année, c’est notre problème défensif qui est important, on pêche sur le fait de prendre trop de buts. C’est dû au changement. On a changé 9 joueurs cette année, 7 titulaires dont le gardien de but. Sincèrement, si on avait eu un effectif beaucoup plus stable, on nous aurait vu durablement dans les cinq premiers. Ces changements nous pénalisent pour le rendement. J’espère garder l’année prochaine l’effectif, on sera plus efficaces défensivement.
Un mot sur le groupe à disposition pour le match contre Brest vendredi ?
Ca rentre, ça rentre ! Comme disait mon médecin, ce n’est plus une équipe mais un hôpital ! Ca commence à revenir, à part l’immense déception d’avoir perdu Thiago… N’Diaye revient, Rincon aussi, l’effectif s’étoffe pour ces derniers matchs.
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