Didier Quillot, ancien directeur général de la LFP au moment de l’appel d’offres de 2018 qui avait érigé Mediapro comme nouvelle place forte de la diffusion de la Ligue 1 et de la Ligue 2, est sorti du silence ce jeudi concernant cette affaire. Interrogé par l’Assemblée Nationale sur le fiasco qui a entraîné une grande crise financière dans le foot français, Quillot a donné sa version des faits. Pierre Rondeau a compilé ses déclarations dans un fil Twitter bien détaillé.
Audition de Didier Quillot terminée
Thread ici ⬇️⬇️ https://t.co/2kALDt2uNt— Pierre Rondeau (@PierreR0ndeau) July 22, 2021
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Sur l’absence de garantie bancaire demandée à Mediapro
Il faut rappeler le contexte de l’époque. En 2017-2018, Neymar arrive dans le championnat de France et le groupe Altice débarque dans le marché des droits TV. En Europe, tous les grands championnats voient leurs droits augmenter. Il y a une pression des clubs français qui est mise pour atteindre le milliard de droits TV. Il faut faire progresser la valeur des droits. Dans le même temps, la Chine fait du football une priorité nationale et des investisseurs chinois débarquent massivement en Europe (…). Les éléments législatifs, c’est très important. La France est le seul pays européen qui a une loi qui encadre les appels d’offre, la loi Lamour de 2004. Nous avons l’obligation de présenter les appels d’offre à l’autorité de la concurrence et doivent faire l’objet d’un règlement. Nous ne pouvons pas changer l’appel d’offres et nous n’avons pas mis une garantie bancaire en première demande. C’est strictement impossible et depuis 25 ans, cela n’a jamais été demandé, y compris à Vivendi ou Orange. Le comité de pilotage, constitué de dirigeants de Ligue 1 et de Ligue 2, a validé tous les points de règlement et tous les changements, y compris le découpage en 7 lots, calendrier et la programmation des matchs.
L’attitude de Canal+
Sur le lot 1, Canal+ propose 262 millions d’euros et Médiapro 330 millions d’euros. On propose à Canal de surenchérir et ils refusent. Sur le lot 2, Médiapro propose 250 millions d’euros et Canal+ 10 millions d’euros. Sur le lot 3, Bein 332 millions d’euros, Canal propose 10 millions d’euros. Canal ne souhaite pas surenchérir. Maxime Saada a souhaité faire échouer l’appel d’offres dès l’instant où ils n’ont pas obtenu le lot 1. Le groupe Canal+ a pleinement assumé sa stratégie de faire échouer l’appel d’offres et de faire en sorte que le prix de réserve ne soit pas atteint (…). Avec cette stratégie de Canal+, nous en venons à être obligé d’attribuer les lots à Médiapro, puisqu’ils remportent les enchères et nous devons respecter le règlement. Le conseil d’administration de la ligue valide ces choix et l’ensemble des résultats. Il aurait fallu imposer, dans le règlement, un dépôt d’acompte de 10 ou 20% du total du contrat sur 1 an dès la candidature.
L’échec de Mediapro
Le business-plan de Médiapro était particulièrement compliqué, à 25€ par mois. Mais nous pensions qu’au bout de 2 ou 3 années, l’équilibre aurait pu être atteint. Nous pensions que Médiapro, avec son actionnaire chinois, aller se positionner dans la durée. Pourquoi Médiapro a échoué ? La valeur du football n’est plus la même en 2020, avec les matchs à huis-clos. Deuxièmement, depuis 2019, la loi chinoise interdit les investissements en Europe, l’actionnaire ne suit plus. Troisièmement, le piratage augmente et grève la valeur des droits. Enfin, quatrièmement, pas d’accord de diffusion entre Canal et Médiapro. Tout cela provoque l’échec de la nouvelle chaine. Nous n’avons ni été en aveuglement ni en imprudence, nous avons été extrêmement rigoureux tout le long, sur la base de ce que nos experts nous faisaient remonter. Est-ce qu’il y a eu, de la part du comité de pilotage, une erreur de ne pas demander une garantie financière ? La réponse est bien évidemment oui. La LFP n’a jamais demandé de garantie depuis 25 ans, c’est ce qui a toujours été fait précédemment.
Crédit photo : Michael Baucher/Panoramic/Imago.