25 avril 2018 : à quelques jours de la fin de la saison de Ligue 2 2017-2018, le FC Sochaux Montbéliard annonce officiellement l’arrivée du groupe Baskonia-Alavès comme « responsable de la gestion globale du FCSM durant trois saisons. »
25 novembre 2018, sept mois plus tard : le FC Sochaux Montbéliard annonce officiellement la mise à l’écart de José Manuel Aira, coach principal, nommé quelques mois plus tôt par…le groupe Baskonia !
Alors que le groupe espagnol annonçait l’objectif de « mener à court terme un projet permettant au FC Sochaux-Montbéliard d’amorcer une régénération dans les domaines économique et sportif et jeter ainsi les bases d’une nouvelle organisation conservant la propre identité du club », il semble aujourd’hui important d’établir un premier bilan, à la lecture des trop nombreux – comme toujours depuis la revente du club par Peugeot – épisodes qui ont mouvementé le club, ses acteurs et en premier lieu ses fidèles supporters.
Le domaine sportif
Depuis 2014 et son retour en Ligue 2, le FC Sochaux Montbéliard n’a pas offert de grands moments footballistiques. Quelques belles émotions en Coupe, un début de saison prometteur l’an dernier, trop peu pour un club historique du football français. Finalement, il semblait presque difficile de faire pire que ces quatre dernières saisons de Ligue 2, toujours conclues dans le ventre mou du championnat… Et pourtant, le FCSM est déjà dans le dur : avec une moyenne de moins d’un point par match, le club doubiste occupe une actuelle place de barragiste. Il ne doit qu’à l’extrême faiblesse de Nancy et du Red Star cette situation qui pourrait être encore pire et qu’il faudra vite rétablir d’ici la trêve et le mercato d’hiver. Car ses concurrents directs pourront eux recruter et se renforcer en vue d’obtenir le maintien en Ligue 2.
Passé la « nouveauté » et les trois victoires du mois d’août en championnat, l’équipe sochalienne n’a depuis plus gagné qu’un seul match en Ligue 2. Après quelques poncifs de confrères coachs sur la tactique « espagnole » de l’entraîneur principal qui surprenait certains adversaires, peu d’équipes ont éprouvé de difficultés face à cette formation cosmopolite, montée de toutes pièces par le groupe Baskonia en partie depuis ses clubs satellites, dans laquelle les jeunes formés au club se sont retrouvés propulsés cadres du jour au lendemain. Une situation inconfortable pour tout le monde sur le terrain, qui s’est traduit par une déliquescence du jeu au fil des rencontres ; en plus d’une usure mentale qui a coûté des matchs parfois au scénario incroyable (tel le 0-2 devenu 3-2 au Havre).
Le domaine économique
Baskonia est arrivé à Sochaux avec l’optique d’une politique low-cost : le mercato d’été en a été le symbole parfait sur le terrain. Les joueurs habitués à la Ligue 2 ou auteurs de bonnes performances sous le maillot sochalien ont vu des propositions de prolongation tellement faibles qu’elles s’apparentaient à un « au revoir », les jeunes à la potentielle valeur marchande ont été conservés et un tas de nouveaux joueurs est arrivé des quatre coins de l’Europe. Une grande disparité culturelle mais aussi de niveau ! Il y aura peut-être de belles trouvailles (Demirovic, Anderson) mais aussi de sacrés bides (Budkivskyi). Surtout – et il faut en parler puisque c’est une des préoccupations premières de Baskonia – des joueurs comme Prévot, Ruiz ou Fuchs, que l’on voyait taillés pour la Ligue 2 voire mieux, sont peut-être en train de perdre une partie de leur valeur du fait du niveau de performance de l’équipe. Rarement on aura vu ces garçons autant en difficulté sur le plan personnel sur les terrains de Ligue 2… Pour les autres joueurs, les contrats court terme (2 ans maximum) ne permettront pas de faire rentrer de belles sommes sur le marché des transferts. Une fois de plus depuis l’arrivée des actionnaires chinois à la place laissée libre par Peugeot, on comptera sur d’éventuels bonus d’anciens joueurs formés au club pour arrondir le budget.
Car il y a urgence à apporter des fonds au FCSM : la semaine passée, la DNCG a tout simplement annoncé une une rétrogradation, à titre conservatoire, de l’équipe première à l’issue de la saison sportive en cours, couplée à l’encadrement de la masse salariale figurant au budget 2018-2019 et l’interdiction de recruter à titre onéreux. La routine, somme toute, puisque ce n’est pas non plus la première fois depuis l’arrivée de Wing Sang Li. Mais la promesse, ou du moins l’ambition de Baskonia de « régénérer le domaine économique » sonne déjà moyennement et peut inquiéter en vue des prochains mois, malgré les restrictions budgétaires qui ont eu lieu à tous les étages du club, quitte à réduire au strict minimum certains postes de dépenses.
L’identité
Il ne se passe pas une semaine sans qu’un ancien joueur, dirigeant, élu local, entraîneur, partenaire du club ou personnalité du football français n’évoque la « perte d’identité du FC Sochaux Montbéliard ». Plus personne ne reconnaît le club historique du football français, déjà sérieusement amoché par plusieurs années de politiques Wing Sang Li-Tech Pro. L’arrivée de Baskonia a porté un coup supplémentaire au club, et les supporters ont tour à tour déchanté : alors que la Tribune Nord Sochaux lançait un appel au boycott dès le début de saison, ils ont été rejoint au fur et à mesure par d’autres groupes dans leur action. Progressivement, les fidèles désertent le stade Bonal, qui enregistre encore des affluences officielles supérieures à 5 000 spectateurs en comptant les abonnés. Bonal sonnait déjà creux depuis le début de saison, il est désormais quasi vide…
A côté, plusieurs groupes de supporters ont proposé une alternative. Il y a d’abord eu le projet Sociochaux, visant à affirmer la place prépondérante des supporters au sein de leur club, malgré leur mise à l’écart totale du pouvoir décisionnaire. Puis, après quatre mois sans suivre passionnément leur club, plusieurs groupes ont appelé à se rendre au stade René Blum avec l’ « envie de renouer avec leur raison d’être, l’activité en tribune », pour supporter l’équipe U19 de Pierre-Alain Frau : « le centre de formation restant le dernier bastion authentique du FCSM. » Deux actions qui ont rencontré un large succès et un fort engouement, signe d’une fracture de plus en plus importante entre la base du club et les nouveaux venus espagnols.
La suite…quelle suite ?
Est-ce aussi pour cela que, ce même dimanche après un nouveau match à Léon Blum des U19 devant un public nombreux, la direction du FC Sochaux Montbéliard a choisi de nommer Omar Daf en remplacement de José Manuel Aira ? Le coach « made in Baskonia » écarté au profit d’un homme qui fait l’unanimité dans l’esprit collectif sochalien ? En tout cas, dès sa première conférence de presse, Omar Daf s’est voulu rassembleur : « Le plus important est de fédérer tout le monde. Ce club a une histoire et doit être soutenu et respecté. Je lance un message aux supporters car c’est tous ensemble que nous nous en sortirons. » A sa place, il ne pourrait en être autrement. L’homme a accepté une mission, celle de sauver un club qui lui est cher, et pour lequel il accepte de se mettre en mauvaise posture sur le plan sportif, tant la situation est complexe. De son côté, c’est un joli pavé jeté au milieu des supporters sochaliens, qui se posent sans doute déjà des tas de questions : supporter son club au-delà en faisant fi de tout ce qui a été enduré depuis l’arrivée de M.Li ? Faire comme l’an dernier et pousser ses couleurs, même si cette année ce ne sont plus « ses joueurs » mais d’illustres inconnus qui repartiront dès la fin de leur contrat ? Continuer à déserter les tribunes, quitte à laisser le club s’effondrer sportivement ? Laisser ce FCSM mourir à petit feu et le voir/faire renaître ensuite ?
Les sujets à débat ne manquent pas pour les amoureux du FC Sochaux Montbéliard. De leur côté, les dirigeants ont aussi quelques sérieux problèmes à régler, tant le dialogue apparaît comme inexistant entre le propriétaire Wing Sang Li et le prestataire Baskonia. Avec la faillite sportive de Baskonia, Wing Sang Li est-il déjà en train de reprendre la main comme en atteste la nomination d’Omar Daf ? Le groupe espagnol évoquait à la fin de l’été l’hypothèse de racheter le club, écartée par l’actionnaire principal chinois. Depuis, une fin prématurée du contrat de prestation de services a été évoquée. Sans plus de clarté. En cette fin de journée, le brouillard tombe dans le ciel de Montbéliard, aux abords du stade Auguste Bonal. Pas celui des fumigènes de supporters qui rêveraient de faire rebattre le cœur d’une enceinte pour laquelle ils vibrent depuis des années, mais celui d’une inquiétude grandissante autour d’un club historique du football français, qui, à force de naviguer à vue, pourrait bien finir par se heurter de plein fouet à un roc immense et implacable : la violence économique d’un certain football mondial, qui place Sochaux sur une carte mondiale à la Bourse de Hong-Kong mais laisse quasiment indifférent aux quatre coins de la France…
Crédit photo : Sam Coulon
Un épisode de plus dans l'affrontement, de plus en plus manifeste, entre Wing Sang Li et le Baskonia sur le sujet du rachat du club. Mr Li, alléché par l'odeur de l'indemnisation du club par la FFF n'entend pas céder ses droits. Baskonia laisse-t-il, dans le cadre de cet affrontement, filer le sportif pour obtenir une dévalorisation totale du club qui contraindrait Mr Li à une cession au plus bas prix ? La question se pose et, dans cette perspective, la nomination d'Omar Daf apparaît bel et bien comme une réponse du berger à la bergère.
Merci pour ce constat. Allez sochaux !!! On ne peut pas laisser tombé ce club quelque soit la situation