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Ligue 2 – Ajaccio – Bastia : 100 minutes pour faire tomber une soirée à l’eau

La conjonction de deux événements regrettables, un sécuritaire et un autre météorologique, ont eu raison de la rencontre de la 10e journée de Ligue 2 entre Ajaccio et Bastia. Face à cette situation inédite, les règlements ont été respectés à la lettre avant la décision du report. Néanmoins, était-il nécessaire d’attendre plus d’une heure et demie pour délivrer une décision qui semblait inéluctable ?

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C’est sur le terrain que la « bagarre » était censée avoir lieu entre Ajaccio et Bastia au stade Michel-Moretti samedi soir. Comme le veut une certaine tradition, ce derby corse, réduit à moins de 42 minutes, aura été engagé voire rugueux -26 fautes et un carton jaune au bout de 38 secondes pour l’Ajaccien Everson Jr- mais restait dans le domaine de l’acceptable. C’est dans les tribunes que les limites ont été franchies.

Une interdiction de déplacement pas étanche

Le déplacement de supporters bastiais était interdit par arrêté préfectoral samedi. Non seulement au stade mais aussi dans le centre-ville d’Ajaccio ou « toute personne se prévalant de la qualité de supporter du Sporting Club de Bastia ou se comportant comme tel » était proscrite. Dans les faits, le parcage visiteur était bien vide, simplement affublé d’une banderole chambreuse et un brin énigmatique, « Pasta 1905 » en référence au groupe de supporters du SCB, Bastia 1905.

Oui mais voilà, comme lors de la rencontre de Ligue 1 entre Montpellier et l’OM, des supporters de l’équipe visiteuse ont exploité la faille de la mesure : ils sont venus au stade, sans se prévaloir… dans un premier temps. Alors qu’ils sont finalement repérés par des ultras ajacciens, une bagarre éclate : mouvement de foule, fumigène lancé, spectateurs sur le terrain ou très près de celui-ci : quelques joueurs de l’ACA se précipitent vers la tribune pour tenter de calmer le jeu mais l’initiative louable ne suffira pas. L’arbitre de la rencontre, Olivier Thual, renvoie tout le monde au vestiaire alors que se prépare la réunion de la « cellule de crise » entre délégués des clubs, de la Ligue de football professionnel (LFP) et de la préfecture.

Alors que le ministre de l’Intérieur indiquait jeudi la possibilité de généraliser les interdictions de déplacement, celles-ci viennent de montrer leur limite deux fois en moins d’une semaine. Du côté du public, on n’est pas non plus à l’abri de toute contradiction : alors que des banderoles contestaient samedi encore les restrictions de déplacement, les événements sont venus une nouvelle fois démontrer une incapacité pour les supporters de deux équipes adverses de cohabiter sans être séparées par une barrière de sécurité et deux cordons de CRS.

La météo s’en mêle

Peu après 20h45, les décideurs s’enferment à clé pour décider du sort de la rencontre, alors que les forces de l’ordre s’exercent à le rétablir. De longues minutes passent sans que la moindre décision ne soit annoncée, ce qui laisse le temps à un nouvel acteur de s’inviter à la soirée : la pluie. C’est même un orage diluvien qui s’abat sur le stade Michel-Moretti. En principe, une interruption de match ne doit pas excéder les 45 minutes. À 21h35, M. Thual fait logiquement son retour sur la pelouse et constate qu’elle est détrempée et devenue impraticable. Les installations électriques souffrent au plus fort des intempéries mais le fonctionnement sera rapidement rétabli.

C’est alors que le compteur est remis à zéro, puisque la cause de l’interruption a changé. L’arbitre explique à Corse Matin : « On a constaté l’impraticabilité du terrain suite aux conditions météorologiques. Le règlement nous donnait 45 minutes pour espérer reprendre. » Dans la foulée, une nouvelle échéance est donc annoncée par les délégués de la rencontre à 22h20. Pendant plus d’une demi-heure, spectateurs et téléspectateurs vont donc devoir attendre de voir si la pelouse redevient praticable… alors que la pluie continue de tomber !

Une attente interminable

Pendant que les suiveurs de la rencontre attendent des nouvelles d’un assèchement plus qu’improbable, les décideurs retournent s’enfermer dans les coursives du stade pour une réunion dont absolument rien ne filtre, comme si elle se déroulait au 4e sous-sol de la DGSI (Direction générale de la Sécurité intérieure). Il faut donc attendre jusqu’à 22h20 pour attendre une décision qui ne fait pourtant aucun doute. Si la rencontre avait dû reprendre à cette heure, il aurait fallu disputer les derniers instants de la première période, effectuer une nouvelle pause (mi-temps) avant la seconde période, pour une fin de match aux alentours de 23h30, temps additionnel compris.

Pendant ce temps, les journalistes et consultants de beIN Sports, entre quelques bandes-annonces et replay font de leur mieux pour meubler avec des quiz où en commentant le match Real Madrid – FC Barcelone (0-4) diffusé sur un autre canal. À l’heure fatidique, le report de la rencontre ne fait plus aucun doute mais il faut encore qu’il soit annoncé officiellement.

Communication minimale de la LFP

C’est alors que la conférence de presse la plus courte de la saison est organisée. En deux phrases, Olivier Thual explique sa décision puis le délégué de la LFP coupe court : « Je vous remercierai de ne pas poser de questions » dans une conception toute particulière du dialogue. Le match se verra attribué une nouvelle date par la commission des compétitions, probablement pas avant fin novembre, entre trêve internationales et deux tours de Coupe de France (7e et 8e) pour les clubs de Ligue 2

C’est donc seulement à 22h30 que le speaker du stade est autorisé à informer les derniers spectateurs toujours présents qu’ils peuvent s’en aller, malgré un micro en panne. Que d’eau, que d’eau… et que de temps perdu.

Photo ©Anthony Bibard/FEP/Icon Sport

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