Le 12ème homme demeure le terme le plus employé pour évoquer les supporters. Dans certains stades, le speaker joue un rôle non négligeable pour assurer l’ambiance. C’est le cas à Dijon où Anthony Buonocore officie depuis plusieurs années, et a obtenu le titre de meilleur speaker de Ligue 2 en 2013-2014. Interview avec ce passionné de foot, d’ambiance, et du DFCO !
MaLigue2 : Comment définis-tu ton rôle de speaker au DFCO ?
Anthony Buonocore : Dans un premier temps, il s’agit d’être le relai entre les joueurs et le public. Ce n’est pas que faire des annonces publicitaires, même si ça fait partie du métier. L’autre facette, c’est d’animer et de faire en sorte que lorsque les joueurs entrent sur le terrain, ils sentent que ce douzième homme soit présent. Je fais partie de ces speakers qui essayent d’être en majeure partie neutres, je ne dis pas à Dijon de faire plus de bruit que les supporters adverses : l’idée que je me fais du football, c’est que ce soit une fête dans le stade. 20 minutes avant la rencontre, j’essaye de faire bouger les tribunes, peu importe qui est dans la tribune.
Et comment cela se passe-t-il en Ligue 2 ?
En Ligue 2, c’est compliqué d’avoir du monde et j’ai de la chance à Dijon où l’on est dans les 5 meilleures affluences, c’est très plaisant. Les gens viennent aussi au stade parce qu’il y a cette partie animation, ils arrivent souvent une demi-heure avant le coup d’envoi. On a la chance de pouvoir faire vivre ces à-côtés.
« Je discute beaucoup avec les supporters »
Le public de Gaston Gérard est plutôt familial et colle avec cette image bon enfant. Mais n’est-ce pas difficile parfois de ne pas avoir un vrai kop derrière toi pour reprendre ou lancer des chants ?
Je pense que ce serait plus difficile d’animer un stade avec des kops, qui la joueraient de manière plus individuelle. Le but d’un kop c’est d’animer un stade. J’ai la chance que le public m’écoute, de par mon histoire aussi. A Dijon, le foot est arrivé tardivement, et j’étais capo dans un des groupes de supporters quand Dijon commençait à monter. Mon amour pour le club m’a amené à devenir animateur en Ligue 2. J’ai grandi avec le club, je suis identifié comme speaker de Dijon.
La plus belle des récompenses, c’est quand le public t’écoute : si on m’avait dit un jour que je pourrais lancer un « Aux Armes » à Dijon… Mais c’est parce que le public est attentif. Quand je termine un match, je discute beaucoup avec les supporters pour essayer de comprendre ce qui a été, réfléchir comment on pourrait faire bouger certaines choses.
A Dijon, tu as par exemple instauré le clapping (relayé par l’OGC Nice la première fois en France en dupliquant les supporters grecs et turcs). Tu t’inspires de ce que tu vois sur d’autres stades en terme d’animation ?
Je m’en inspire mais je cherche avant tout à créer une identité propre à Dijon. Le clapping fonctionne très bien dans certains stades, à Dijon aussi, mais je ne le fais pas tout le temps. Le rituel ici est le « Aux Armes », lancé en 2009 en avant-match. Parce qu’on commençait à avoir nos tribunes nord et sud populaires, et qu’il fallait trouver quelque chose de simple qui fasse bouger. Deux tribunes qui se répondent, j’ai trouvé extraordinaire et le public a bien pris, c’est devenu une institution. Petit à petit, je me suis inspiré de ce qui se faisait ailleurs. Mais le plus simple reste de discuter avec les groupes de supporters, de voir avec eux ce qu’ils préconisent : ils sont dans les tribunes, proches du public, je suis là pour créer le lien et le but du jeu est que les chants lancés en avant match soient repris pendant le match.
« La dernière voix que les supporters entendent en quittant le stade »
En tant que supporter, lorsque mon équipe perd à domicile, je n’ai pas très envie d’entendre le speaker en fin de match. C’est difficile de faire le job dans ces moments-là ?
Dans ces moments là, il faut tout de suite oublier la promo, ça n’intéresse personne. Mais il faut parler du match, évoquer l’équipe qui vient saluer son public. Ca m’est arrivé une fois l’année dernière, tu mènes 1-0 et tu perds dans les arrêts de jeu : dans ces conditions, et quand tu perds un match, il faut tout de suite prendre le dessus, lancer une musique et prendre un ton positif. J’ai remarqué dans d’autres stades, les speakers prennent le micro avec de la déception lors d’une défaite et le fait de balancer cette déception rend les supporters encore plus déçus. Même si on perd, c’est important de faire ressortir le positif immédiatement, même si cela n’enlève pas la déception des supporters. Malgré tout, la dernière voix qu’ils entendent en quittant le stade, c’est le speaker, et si tu es négatif ça renforce ce sentiment.
Quel est la journée type du speaker le soir de match ?
Je prépare le match quelques jours avant, comme n’importe quel média. A partir de 18h, j’ai une réunion obligatoire avec les délégués de la rencontre, on m’informe de tout ce qui va se passer : animations, minute de silence, horaires, nombre de supporters, protocole… Ensuite, je me cale avec la régie pour vérifier la sono, la coordination avec les écrans géants… Après, il se passe une heure pendant laquelle je fais le tour de tout le monde : supporters, dirigeants, joueurs, et par rapport à tout ça, tu te cales pour l’ambiance.
Quand je rentre sur le terrain, ça monte crescendo de quart d’heure en quart d’heure : entrée des joueurs, échauffement avec une montée en puissance jusqu’au retour des joueurs au vestiaire, à 19h45. A partir de là, tu sens tout de suite comment réagit le public : soit tu vas passer le quart d’heure le plus horrible de ta vie, soit c’est un super moment jusqu’au bordel pour l’entrée des joueurs sur le terrain. Dans le tunnel, ils sentent et entendent le public, c’est super important pour eux ! Ils en sont conscients et c’est aussi pour eux qu’on le fait, ce sont eux qui vont gagner les points ensuite sur le terrain !
Salut Anthon........ n'oublies pas mes 10€ !! :-)